Dimensions et cultures du Bouddhisme
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 Sujet douloureux : islamisme à l'école

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MessageSujet: Sujet douloureux : islamisme à l'école   Sujet douloureux : islamisme à l'école EmptyVen 8 Sep - 23:30

Article : le monde des religions

Un ancien principal de collège témoigne

Propos recueillis par Bénédicte Lutaud - publié le 07/09/2017

Dans Principal de collège ou imam de la République, Bernard Ravet, ancien principal de collèges des quartiers nord de Marseille, témoigne de l’emprise du religieux à l’école. Entretien.


Principal de collège ou imam de la République ?* Un titre un brin provocateur, pour un sujet explosif, en pleine période de rentrée scolaire. Pendant quinze ans, Bernard Ravet a été principal de collèges de ZEP (Zones d’éducation prioritaires) classés «prévention violence». Tout ce temps, soumis au devoir de réserve, il s’est tu. Désormais à la retraite, il s’est décidé à briser le silence.

Au début des années 2000, outre la délinquance, un nouvel adversaire a fait irruption : Dieu. Non-respect de l’égalité homme-femme, contestation des enseignements scolaires, casse-tête autour des menus à la cantine, surveillant radicalisé prêchant en douce aux élèves... Face à la montée de l’emprise du religieux dans les quartiers, il lui a fallu s’improviser « imam de la République », dit-il.




Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre ?

Beaucoup d’ouvrages théoriques autour de la montée de l’islamisme et du religieux chez les élèves ont été publiés, mais il manquait des témoignages de terrain. Ce que j’ai fait est une sorte de documentaire. J’explique ce que je vivais au quotidien : parfois des moments de très grande violence, parfois de très grande souffrance intellectuelle, parfois des longues périodes de doute. Il y a aussi du positif : je montre comment les enseignants sont arrivés à bricoler, au sens noble du terme, des réponses, alors que peu, pourtant, ont choisi d’être dans ces établissements difficiles.



C’est d’ailleurs l’un des problèmes que vous évoquez : le manque de formation des enseignants dans ces lycées difficiles.


Je propose en effet de créer un corps spécialisé, mais cela dérange beaucoup dans le monde syndical. Je disais à un ami qui avait alors des responsabilités à l’IUFM de Marseille : « Tu me fabriques des dermatologues, moi j’ai besoin de médecins du SAMU. » Aujourd’hui, on attend d’un enseignant qu’il transmette des savoirs, mais toute une dimension de la gestion de la violence – et de la gestion sociale – n’est pas prise en compte. Or, la violence est toujours l’expression d’une souffrance.



« Imam de la République » : que veut dire ce titre ?


C’est une phrase que je disais souvent à des élèves ou des familles qui ne comprenaient pas pourquoi on avait pris telle ou telle décision, en particulier sur le manque de respect à un professeur. J’expliquais, en filant la métaphore : « Le collège, c’est la République. La République a des règles, comme la religion a des règles. Il ne viendrait pas à l’idée de votre enfant de manquer de respect à l’imam. » Cette comparaison n’était pas anodine : l’imam, cela signifie aussi « celui qui sait ». Cela fonctionnait. Je me souviens aussi de ce parent d’élève qui m’avait donné un proverbe où il est expliqué qu’il faut respecter ses enseignants, ses parents, comme on respecte «ceux qui parlent de Dieu». Il m’avait écrit ce proverbe en français et en arabe. Je m’en servais parfois face à des familles.




Entre le principe théorique de laïcité et la réalité, il faut parfois savoir faire des entorses aux règles ?

Des entorses sont nécessaires quand elles sont porteuses de sens et de bienveillance envers les élèves et les familles. Je cite l’exemple de ce jeune garçon décédé dans un crash aérien. Les élèves et le proviseur d’un collège marocain jumelé avec le nôtre étaient présents, avec les familles, dans le collège, pour lui rendre hommage. Mon confrère marocain – au Maroc, l’islam est religion d’État – , me propose de dire « la prière des morts ». Pouvez-vous imaginer que je refuse ? Par ailleurs, la prière des morts, que je connaissais, a un aspect tout à fait universel. Elle est presque laïque. L’exercice est difficile. Nous sommes dans une culture qui est très laïque. Mais nos élèves, dans ces collèges-là, ont une tout autre culture.



L’irruption du religieux au collège a commencé au début des années 2000. Vous évoquez l’épisode de la « Journée de la jupe »...


Un soir, rentrant de réunion, trois enseignantes sont agressées par des jeunes installés dans un snack devant lequel elles passent. Elles reçoivent des canettes et se font traiter de «putes», de «salopes». Le lendemain, nous apprenons que des jeunes filles, élèves au collège, sont victimes de la même agression. Nous prenons des décisions assez lourdes : pendant plusieurs semaines, elles seront protégées par la BAC (Brigade anti-criminalité) pour faire leur trajet du collège au métro. Nous allons même plus loin : une professeure pense qu’un ancien élève se trouve parmi les agresseurs. Nous avons donc introduit avec les enseignants un policier « déguisé » en professeur, et la même scène se produit. Le jeune en question a pu être arrêté. Mais cet épisode va avoir une autre conséquence : la présence de la BAC gêne les dealers aux abords du collège ! Trois jeunes dealers, que je connais, vont demander à s’entretenir avec moi pour lever ce dispositif.



Que se passe-t-il alors ?

Je les reçois et nous finissons par avoir une grande discussion sur le thème du religieux. Je leur fais remarquer que ce qu’ils vendent tue : qu’en pense l’imam ? Ils me répondent : « Ce n’est pas comme chez vous, l’imam n’a rien à dire, nous on ne se confesse pas ! » Ils poursuivent : « De toute façon, celui qui consomme de la drogue est un mécréant. » Quelque part, ils justifiaient leurs pratiques délinquantes par une forme de djihad... Après cet épisode, les enseignantes ne sont plus venues en jupe. Elles s’autocensuraient pour ne pas se mettre en danger.



Comment éviter la récupération du propos de votre témoignage par l’extrême droite?


Si on se donne la peine de lire honnêtement cet ouvrage, il est impossible de faire de la récupération. Bien sûr, si on ne s’en tient qu’à quelques extraits croustillants, on peut mal l’interpréter. Ce livre est un récit de vie des établissements. C’est aussi un hommage aux enseignants : ils mouillent le maillot, ils inventent des stratégies pédagogiques pour transmettre les valeurs de la République et remplir leur mission, tout en tenant compte, par exemple, que l’égalité garçons-filles n’est pas une valeur acquise pour beaucoup de nos élèves, pour des raisons culturelles ou cultuelles. Il ne s’agit pas de changer le discours, mais de passer de la théorie à la pratique !



Vous donnez de nombreux exemples de ces « exercices pratiques », sur la question de la cantine notamment.

Nous avions choisi de proposer du poisson, des œufs ou des féculents, ce qui permettait de contenter tout le monde, sans pour autant renoncer à nos principes. La question, posée par les familles, a été discutée en conseil d’administration. L’argument mis en avant était le suivant : «Pourquoi, quand on est à l’hôpital, on peut choisir un menu religieux, et quand on est au collège, on ne peut pas ?» Je devais expliquer que, dans le contexte juridique particulier du collège, j’avais deux soucis : la laïcité et la démarche sociale. En effet, nous étions convaincus que dans un certain nombre de collèges de quartiers très défavorisés, le repas à la cantine était le seul de la journée. Si d’un seul coup, la moitié du repas n’était pas pris, quid de la démarche sociale ? Cette solution mettait en cohérence notre volonté sociale et le respect de la loi.



Face à ces problèmes, vous vous heurtez au silence radio de l’institution. Finalement, l’aide viendra davantage de la police, des Renseignements généraux, du Conseil général ou des associations.

Remettons les choses en perspective. Le livre parcourt treize ans dans ces collèges difficiles et s’arrête avant les attentats contre Charlie Hebdo. Or, je pense que le refus de certains élèves de respecter la minute de silence après ces attentats marque un tournant dans l’histoire. Aujourd’hui, un chef d’établissement aurait une réponse. Mais il a fallu attendre longtemps. Pourtant à l’époque, les Renseignements généraux avaient déjà une bonne vision de ce qui se passait autour des établissements – notamment des associations musulmanes d’aide aux devoirs qui sont en réalité des systèmes d’emprise –, et un rapport de l’inspection générale, le rapport de Jean-Pierre Obin, décrivait la situation. Mais l’institution a mis ce rapport sous la table.



Selon vous, était-ce une sous-évaluation du problème, un déni... ?


De la part de l’institution scolaire et des politiques, il s’agissait, selon moi, d’une mauvaise connaissance du terrain et du religieux. À l’époque, il était rare de parler d’une mosquée salafiste ou d’une mosquée tabligh (mouvement fondamentaliste, ndlr) et, en outre, difficile d’évoquer ces dérives sans être étiqueté « islamophobe ». La peur de stigmatiser a fait que certaines choses ont été passées sous silence. Et c’est encore parfois le cas aujourd’hui. Il y a aussi peut-être cette confusion, dans la culture des enseignants, ou plus généralement la culture de gauche – et je revendique être un homme de gauche – : on arrive à tolérer, mais à un certain moment, on tolère l’intolérable. Et là, c’est l’effet boomerang.



Un autre symptôme de cette emprise du religieux à l’école est la contestation croissante des enseignements. Aborder la Shoah, en particulier, est devenu de plus en plus compliqué... Quelles solutions ont trouvé vos enseignants ?



Le refus de l’enseignement de la Shoah a commencé dès 2004. L’une des réponses est peut-être la sortie scolaire : à Aix-en-Provence se situe le fameux Camp des Milles (camp d’internement et de déportation ouvert en 1939, ndlr). Au collège Versailles, qui est l’un des plus difficiles de Marseille, un enseignant avait choisi de faire venir un ancien résistant. Dès lors qu’une parole humaine s’exprime, l’émotion est très différente. D’autres enseignements sont contestés : le darwinisme, mais aussi la relation au corps. Nous sommes obligés de sous-traiter toute l’éducation à la sexualité, qui fait partie intégrante des programmes, par le biais du Planning familial.



N’est-ce pas une façon de baisser les bras ?


C’est toujours la question du rapport entre bénéfice et risque. Dans ce cas précis, je préfère appeler le Planning familial qu’avoir à gérer des grossesses précoces. Cela veut aussi dire que les personnes qui vont intervenir sur ces sujets le feront avec une autre casquette que le professeur : il s’agira d’un médecin, d’une assistante sociale. Parfois, l’élève a besoin de décentrer le discours de l’institution de celui de la société.



Un jour, vous découvrez que l’un de vos meilleurs surveillants a introduit au collège un « petit livre » très particulier...

Ce surveillant était respecté par les élèves, ce qui n’était pas le cas de tous – je comprendrai plus tard pourquoi. Une enseignante m’informe qu’un élève de 5e lui a dit qu’il fallait« couper la main d’un voleur » ou « tuer avec des pierres » une femme qui trompait son mari. Elle demande des explications à l’élève : « C’est dans le petit livre qu’on m’a donné à la mosquée. » Nous décidons de récupérer ce petit livre. Là, nous prenons peur : c’est un livre fait pour les gamins, au même format que celui du téléphone portable. Nous enquêtons et découvrons que le fascicule a été distribué dans la mosquée que fréquente notre surveillant. Il est démasqué. Pour le rectorat, la seule solution est de le prendre « la main dans le sac ». Cette réponse ne peut me satisfaire. Le commissaire du quartier me conseille d’aller voir les Renseignements généraux. Nous découvrons alors que ce petit livre est interdit en France et que ce surveillant est l’équivalent de ce qu’on appelle aujourd’hui un « fiché S ». Le rectorat m’explique qu’on ne peut rien faire : il est titulaire pour six ans. Nous décidons alors d’organiser une grande Journée de la femme le 8 mars. J’en profite pour réunir mes profs et leur distribuer le livre. Trois jours après, le surveillant, se sentant piégé, me demande une mise en disponibilité...



Outre les mesures mises en place depuis votre départ à la retraite, quelles sont, selon vous, les pistes à explorer aujourd’hui pour améliorer la situation ?

Je suis très favorable à la formation des enseignants en collèges difficiles : pour moi, c’est un métier différent et il faudrait imaginer des stratégies de recrutement et de formation pour s’y préparer. Il faut aussi de l’autonomie, sans pour autant abandonner les établissements, et maintenir des structures d’aide aux enseignants et chefs d’établissements. Enfin, un collège reste un espace de culture, avec des partenariats avec des associations, des résidences d’artistes, des sections sportives, etc.



Dans votre ouvrage, vous citez le rapport Debray sur l’enseignement du fait religieux à l’école laïque. Qu’en pensez-vous ?

Je suis très favorable à l’enseignement du fait religieux, tout en sachant les difficultés que cela peut créer. Cet enseignement, face à des publics très fermés, risque aussi de n’avoir aucun impact. Ensuite, il nécessite une excellence connaissance théorique du sujet. Mais je pense que c’est l’un des remparts à l’intégrisme. Cela permettrait de montrer qu’une religion peut avoir des approches différentes.



(*) Principal de collège ou imam de la République ? , Bernard Ravet (éditions Kero, 2017).
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MessageSujet: Re: Sujet douloureux : islamisme à l'école   Sujet douloureux : islamisme à l'école EmptySam 9 Sep - 7:55

Cela m'inspire une réflexion sur les mots.

Notez comme en langue française on parle d'"islamisme" et tout le monde comprend "fanatisme" ou "extrémisme", donc quelque chose de répréhensible, suscitant la désapprobation, la condamnation ou la crainte ou les 2. Une déviance.  

Mais quand on dit le "christianisme" ou le "judaïsme" ou "le taoïsme" ou le "bouddhisme", il y a pourtant du "isme" qui en langue française à plutôt tendance à faire penser à de l’extrémisme justement, mais le "isme" n'a pas la même charge négative que pour l'Islam.

C'est une discrimination, en partie basée sur l'observation des faits mais en même temps le judaïsme ou le christianisme ou le protestantisme ont aussi connu des phases violentes regrettables.

Personnellement je propose de remplacer tous ces "isme" par soit le mot tout court soit par la "voie de". Déjà c'est plus neutre le mot "voie", ensuite c'est plus égalitaire, c'est un mot plus court, et cela sous entend qu'il y a plusieurs voies possible et qu'elles sont toutes respectables, qu'aucune n'est supérieure aux autres. Ce sont toutes des "voies" parmi d'autres.

Exemple :

Le voie juive (ou de Juda).
L'Islam
La voie du Bouddha (à l'intérieur : le véhicule des Anciens, le Véhicule des bodhisattva, le véhicule tibétain ou ésotérique).
La voie du christ (et à l'intérieur : la voie orthodoxe, la voie catholique, la voie protestante).
La voie hindoue.
La voie du Tao ou le Tao.
La voie du shinto.


Etc...

En langue française je pense que ce serait pas mal.

Même si le bouddhisme fait la distinction entre les mots, les désignations conventionnelles, et la réalité ultime, le sens ultime, la réalité telle qu'elle est, et considère que les désignations conventionnelles, les mots, sont impropre en général ou trompeurs ou insuffisants ou inadaptés (comme d'ailleurs pour les religions monothéistes quand il s’agit de "Dieu") nous vivons et communiquons avec ces mots, et comme le dit le Bouddha ils ont le pouvoir de guérir ou de détruire. Donc autant choisir des mots qui réunissent, égalisent et non discriminent.

C'est mon opinion.
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